Découverte
de la vieille ville à présent, d’une zone piétonne avec magasins anciens,
boutiques et place du marché où nous avons acheté des fleurs et du persil dont
les feuilles rappellent les nôtres …
Razzia
chez le fournisseur de couleurs, d’encre, de papiers et de tout le matériel
nécessaire à l’atelier de calligraphie ; il y en avait pour tous les
goûts, tous les usages, j’aime beaucoup ce genre de dépôt.
Emplettes
ensuite chez l’épicier iraqien et au supermarché pour les ingrédients dont nous
avons besoin pour la préparation d’un repas de cuisine libanaise, engagement
que nous avions pris et que nous comptions bien tenir...
Les
gens du Comité Palestine doivent venir dîner chez Øyvind le soir, ainsi qu’Anna et Amanda.
Avec Mona, nous avions fait le menu avant de sortir : riz au poulet,
taboulé, homos et une salade de fruits comme dessert. Pourvu que tout soit prêt
à temps et qu’ils aiment…
Ironie
de l’histoire, il y a eu une coupure de courant ce jour-là, ce n’était pas
arrivé dans la région ou au village depuis la nuit des temps. Le dîner a été
retardé…
Un
clin d’œil de plus en direction de Beyrouth et de nos problèmes quotidiens de
courant. Certes, « votre venue a arrêté la pluie et fait briller le
soleil, mais hélas, vous amenez avec vous les coupures d’électricité
aussi », nous faisait remarquer Astrid, non sans malice.
Avec
sa copine qui dirige un musée et dont le nom m’a échappé, elle était arrivée
tôt dans l’après-midi, nous avait tenu compagnie pendant qu’on préparait le
dîner, attendait le retour du courant avec placidité et s’étonnait de notre
nervosité…
Astrid
est bibliothécaire, elle travaille à la librairie municipale d’Øyer et
fait partie du Conseil œcuménique des Eglises que préside Øyvind.
C’est
une belle femme, un visage ouvert et secret en même temps, serein et vigilant à
la fois, une longue et épaisse tresse presque blanche.
Nous
étions treize ce soir-là autour de la table…
Mais
Øyvind n’est pas superstitieux.
Ce
type de croyances l’amuse, pas de Judas parmi nous …
Il a
quand même installé le chat à un coin de la table
Kittie,
comme il
l’appelle, bien qu’il ne soit plus petit du tout…
Pour
calmer les esprits inquiets, nous dit-il…
Nous
avons beaucoup rigolé au cours de ce dîner
A
cause des toasts portés par presque chacun des dîneurs
Oyvind
souriant et en verve, tous les gens présents acquis à sa cause, était assis à
un bout de la table,
Chemise
blanche sans col, boutonnée au ras du cou,
Il
tapait sur son verre avec son couteau,
Un son
cristallin interrompait toutes les conversations,
Un mot
de bienvenue pour tous les présents
Et
c’était le point de départ de toasts et d’appréciations les plus farfelus,
Certaines
très originaux, souvent touchants.
Je me
souviens surtout de celui de Samir qui m’avait amusée et chagrinée à la fois,
mais qui, en même temps, en disait long sur son état d’esprit, sa perception de
l’accueil qui lui était fait et sur ce qu’il prévoyait d’heureux et de
réconfortant dans les suites de son séjour…
Samir
disait que loin d’être de passage dans un pays étranger, il avait le sentiment
qu’il était enfin de retour chez lui et qu’il pensait qu’une fois rentré chez
lui, il se sentirait alors en pays étranger…
Quelques
mots encore sur la vallée de Gudbrandsdalen
qui abrite le village d’Øyer où nous nous trouvons.
Ses
paysages sont si riches, variés et d’une beauté telle qu’on raconte que
nombreux sont les poètes, écrivains, musiciens et peintres qui y ont trouvé une
grande source d’inspiration.
C’est
le pays d’Ibsen, de Hamsun et de Grieg notamment.
C’est
là aussi que le Peer Gynt d’Ibsen trouvera enfin la tranquillité de l’être, la
sérénité et l’amour au terme de sa folle course à la recherche de son identité
et d’une vie idéale.
Durant
son premier séjour en Norvège, Michel avait pris, de très belles photos lors de
sa randonnée sur les traces de Grieg dans « Peer Gynt
Road ».
L’une
d’elle en particulier, était absolument remarquable
Un
champ de fleurs sauvages au milieu duquel il y avait Anna tout à fait
reconnaissable bien qu’elle ait été de dos, gracieuse silhouette en jupe longue
fleurie, un bouquet de fleurs dans ses mains croisées derrière son dos, la tête
penchée vers le sol ...
Sans
doute avait-elle décelé dans le tapis d’herbes folles qui jonchaient sa route
une plante rare, trèfle ou chèvrefeuille peut-être ou autre chose encore.
Dans la forêt sur les traces d’Ibsen et de Grieg.
le vent soufflait et le temps était à la
pluie et à la désolation. C’était le dernier jour de notre séjour à Øyer dans la demeure d’Øyvind et nous étions tendus
et tristes en raison de l’immanence de notre départ. Les arbres de la forêt
étaient eux aussi noyés par la pluie ; tassés, les branches repliées et
secoués par les éclairs, ils se fondaient dans le gris du ciel.
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